Technologies et PME

Des robots pour protéger les emplois d’ici

En 2012, l’industrie aérospatiale était en pleine transformation. Les grands donneurs d’ordres élevaient leurs attentes pour que leurs fournisseurs assument de nouvelles responsabilités dans la chaîne d’approvisionnement. Découvrez comment l’entreprise Abipa, avec le soutien du Fonds de solidarité FTQ, a effectué un virage technologique spectaculaire pour rivaliser sur la scène mondiale – sans perdre un seul emploi localement.

Coup d’œil sur Abipa

Basée à Boisbriand, Abipa offre l’usinage de haute précision et l’assemblage mécanique de composants et d’alliages complexes destinés aux moteurs, trains d’atterrissage et éléments de structure des avions. Ses clients sont de grandes sociétés comme Pratt & Whitney, Bombardier, Safran, Siemens, Sonaca et Figeac Aero.

Passer de généraliste à spécialiste

En 2012, le marché aérospatial s’ouvrait sur le monde et le Québec peinait à demeurer compétitif. «  Les coûts élevés de main-d’œuvre ne permettaient plus de rivaliser pour les pièces peu complexes, résume Jean Blondin, président d’Abipa. En même temps, les donneurs d’ordres s’attendaient à ce que les fournisseurs gèrent eux-mêmes la chaîne d’approvisionnement et deviennent plutôt des Centres d’excellence.  »

Les clients ne se contentaient plus de passer de simples commandes : ils s’attendaient désormais à ce que chaque partenaire livre, dans les délais, un produit de qualité irréprochable tout en assumant une part plus importante du risque.

Le Fonds de solidarité comme moteur de croissance

Aux yeux du Fonds de solidarité FTQ, Abipa réunissait tous les ingrédients d’une entreprise à succès : une solide équipe de gestion, un produit qui se démarque, un marché au fort potentiel et une vision bien planifiée.

Comme actionnaire, le Fonds accompagne la société dans sa croissance pour faire fructifier l’investissement à long terme. «  Notre mission, c’est d’encourager la création d’emplois et de générer des retombées économiques positives pour l’écosystème québécois », explique M. Jean Wilhelmy, vice-président principal – Aérospatiale, construction, services et transport pour le Fonds de solidarité FTQ. « On ne précipite pas les décisions pour un rendement immédiat.  »

Par son endossement, le Fonds contribue également à l’obtention de nouveaux contrats. Avant d’être retenu, tout fournisseur est soumis à une évaluation exhaustive, notamment de sa solidité financière. «  L’appui d’un actionnaire avec 13 milliards de dollars d’actifs, ça donne un poids significatif  », assure M. Blondin.

Des investissements de plus de 20 M $

En 2014, le Fonds se lançait dans des investissements totalisant plus de 20 M $ au sein d’Abipa. En plus de fournir un bâtiment ultramoderne certifié LEED® Argent à l’entreprise de Boisbriand – une réalisation signée Montoni – , il lui a aussi permis de se doter d’équipements de fabrication à haute vitesse qui sont venus décupler sa capacité de production sans réduire les effectifs.

«  Nous avons grandement évolué au-delà du fonctionnement traditionnel d’un machiniste par centre d’usinage, roulant en moyenne à 50 % d’efficacité  », explique M. Blondin. Grâce aux cellules intelligentes automatisées et robotiques, un seul opérateur est désormais capable de gérer six appareils, à 98 % de productivité et sans intervention humaine. «  Le même poste génère douze fois plus de valeur. Malgré un coût de main-d’œuvre plus élevé, nous demeurons plus concurrentiels qu’en délocalisant le travail à l’étranger.  »

L’entreprise a étendu son investissement à des logiciels et à des systèmes numériques de pointe, à la formation des employés et au perfectionnement des systèmes d’affaires et du contrôle qualité. «  On n’a pas simplement remplacé une machine par une autre : on a acheté une vision  », note M. Blondin.

Robotique, automatisation et capital humain

Si certains se montraient inquiets à l’arrivée du premier robot, la direction d’Abipa les a rassurés en leur faisant part de cette vision. «  Notre objectif n’est pas de réduire les emplois, c’est de les faire évoluer pour assurer leur pérennité  », dit M. Blondin.

Quinze appareils automatisés plus tard, aucun poste ne s’est perdu. «  Il faut voir le long terme : on remplace des emplois de bas niveau par de nouveaux qui viennent renforcer la société  », ajoute M. Wilhelmy.

Les retombées

La vision a porté fruit et Abipa connaît une croissance spectaculaire. «  Sans transformation, notre chiffre d’affaires aurait chuté de 50 %, estime M. Blondin. Nous avons plutôt généré une croissance organique de 40 % en 2017. Nous nous attendons à répéter l’exploit en 2018 et à doubler nos ventes d’ici 2020.  »

Ce virage technologique a permis à Abipa de décrocher un contrat à long terme de 25 ans auprès de Pratt & Whitney, en plus de développer le marché européen. Pour les deux prochaines années seulement, le carnet de commandes dépasse les 100 M $.

M. Wilhelmy croit que lorsque les PME à succès atteignent un plateau, c’est signe que le rôle de l’entrepreneur doit changer pour faire place à une équipe de gestion et à des partenaires financiers. «  Sans perdre la fibre entrepreneuriale, une entreprise doit évoluer à un stade managérial pour poursuivre sa croissance et relever les prochains défis  », enchaîne-t-il.

Avec le soutien financier et l’accompagnement du Fonds de solidarité FTQ, c’est exactement ce qu’a fait Abipa.

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